Vente caritative Avoha part 5 – 8 juin 2015

Street Art
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Dernière étape (ou peut être pas) pour l’ONG Projets Plus Actions. Après l’accroche le 27 mai, puis la prise de rendez-vous le 1er juin, la rencontre le 3 juin et le vernissage le samedi 6 juin, voilà le moment tant attendu de la vente. La pression est à son comble ; pour avoir eu Vincent par Facebook hier, la nuit s’annonçait compliquée. Tout ne se joue pas sur une date mais quand même. L’impact de cette vente est directe pour la vie des projets sur Madagascar. Le travail fourni depuis plusieurs mois, s’organiser de semaines en semaines pour solliciter les artistes, leur donner le support, récupérer l’oeuvre réalisée, le stress des derniers jours, les problèmes des dernières heures par rapport à l’accrochage, par rapport à une oeuvre qui vient d’arriver et qui ne sera peut-être pas prête à temps, tout cela se catalyse dans un instant, une vente aux enchères. L’espoir est de voir grimper les prix.

Je suis en avance. J’attends patiemment dans la cour. Curieux de vivre une première expérience de vente aux enchères. Certaines personnes autour de moi ont les moyens de renchérir sur une oeuvre que je ne peux même pas me payer pour le prix de départ. D’autres univers, d’autres vies. Mais il faut forcément des acheteurs pour que les oeuvres se vendent. Il faut aussi reconnaître le travail et avoir en tête les finalités : soutenir des actions de solidarité à Madagascar.

Un détail me fait plaisir. Jean-Marc ne porte pas de cravate. Que faut il pour bien vendre des oeuvres? Respecter les codes du milieu? En jouer? En donner juste ce qu’il faut tout en restant soi même? Le soleil donne une lumière intéressante dans cette cour intérieure. La pierre renvoie la chaleur emmagasinée pendant la journée. Dans quelques minutes, que se passera-t-il? Des mains qui se lèveront pour ajouter des euros? Des personnes au téléphone qui cligneront de l’oeil pour enchérir?

Plusieurs oeuvres me tenteraient bien. Loin de moi pourtant l’idée de lever la main ou de dire 100 € de plus. Je garderai les yeux et les oreilles grandes ouvertes mais ne bougerai pas. J’espère vous raconter fidèlement ce que je vais vivre. Histoire de boucler mon reportage comme il faut.

Les personnes arrivent dans la cour. Certains se connaissent, discutent. D’autres tranquillement installés sur les chaises de jardin papotent, rêvent peut être d’acquérir une oeuvre. La salle s’ouvre au public. Chacun observe, s’approche, jauge, prend le pou. Chacun tourne, retourne, revient sur ses pas, s’arrêtent. Je salue Vincent. Le sourire qui en dit long. Le stress est là mais semble le galvaniser. Jean-Marc fait les cents pas. Attendre et espérer. Les « tapes » amicales dans le dos semblent le réconforter un peu. Il faut du courage pour se lancer dans une telle entreprise.

Les minutes passent, nous rapprochant de l’ouverture. Et pourtant plus elles passent et plus elles semblent ralentir. Que va-t-il se passer? Comment cela commence? Où sont la fanfare et les lions? Sûrement certains seront dans la salle, à attendre le bon moment pour sortir leur griffe. Vincent passe me voir. Sympa de prendre ce temps alors que tout semble tourbillonner. La tension est palpable mais rien n’est acquis. Chaque oeuvre mènera sa bataille en espérant ne pas subir de défaite, ne pas repartir sans une offre, en souhaitant voir de nombreux rivaux se déclarer et se battre pour elle.

Moins dix. Il y a plus d’entrées que de sorties dans la salle. Le brouhaha prend vie. Une question me vient : l’habit fait-il le moine? Les tongs font elles le riche héritier? Le collier en perle fait il la collectionneuse? D’ailleurs parmi tout ce monde, est ce que certain(e)s artistes sont venu(e)s suivre leur côte ? Des visages familiers : Kanos, Levalet, JBC, Gregos, Le Cyklop. Surement d’autres.

Le signal est donné. La vente va commencer. Un mot du président de Projets Plus Actions, Thomas LEAUD. Diversité des artistes en lien avec la biodiversité des lieux qu’ils tentent de préserver. Jean-Marc reprend la main pour remercier les différents partenaires qui ont rendues possible cette vente. Puis tonnerre d’applaudissement pour Vincent. Bien mérité.

Reprise en main de la vente par le commissaire priseur, Maître Arnaud Oliveux. Explications. Remerciement aux artistes. Une pièce de théâtre se déroule devant moi. Un artiste lui aussi. En même temps il faut animer une vente aux enchères sinon chacun s’endort sur son siège et loupe la vente pour laquelle il était venu. Quelle folie !! Cela part à toute allure. De 100 en 100 euros. Parfois cela monte plus doucement. 3 minutes à peine par oeuvre mais un vrai divertissement. Qui achète? Qui est là au nom de qui? Pourquoi les mains se réveillent parfois si tardivement? Vincent a des acheteurs par téléphone. Certains acheteurs ne pouvant être présent participent à la vente quand même.

On commence les oeuvres faites spécialement pour la vente. Elle commence à 500 €. Cela monte parfois peu. Est ce que cela va s’emballer? Il y a de temps en temps une bataille précise et sérieuse. C’est vraiment fou. « 1050€ vous n’y allez pas. Vous êtes petit bras » dit le commissaire. Les noms des artistes défilent. Les oeuvres sont décrochées. Certains acheteurs sont régulièrement à lever la main et repartiront avec plusieurs oeuvres. Moi je me pose la question de savoir comment dépenser autant d’argent en si peu de temps.

La salle se vide progressivement et les acheteurs récupèrent au fur et à mesure leur achat. Cela jongle entre la salle, internet et le téléphone. Le marteau tombe mais surtout virevolte autour de la tête du commissaire. Il fait des aller-retour dans la salle à toute allure. Il joue avec les mots, avec les émotions des acheteurs. Les personnes attendent parfois le tombé du marteau pour se manifester. C’est une chorégraphie qui faire battre le coeur à toute vitesse. Parfois le commissaire agit sur ordre. Qui sont ces donneurs d’ordre? Qui d’ailleurs sont derrière leur ordinateur? Qui sont de l’autre côté du téléphone? Peut on avoir un coup de coeur pour une oeuvre et ne pas se retrouver en face à un dangereux loup?

Nous approchons de la fin de l’alphabet. Les acheteurs qui ne comptent pas participer aux dernières ventes vont récupérer leur lot tout juste emballé. Après cette frénésie, difficile de redescendre sur terre. Des milliers d’euros sont partis en quelques heures, investit dans l’art urbain. La somme n’a pas été comptabilisée mais je pense que cela a plutôt bien grimpé. 22h25 fin. Je suis épuisé et mon compte bancaire a eu peur plus d’une fois lorsque je me suis gratté l’oreille. Je prendrai le temps de vous montrer dans un prochain article toutes les oeuvres vendues mais également (si j’y arrive) d’avoir quelques retours des artistes.