J’avais entendu parler en amont d’un lieu tenu secret qui allait accueillir plusieurs noms du Street art français et international. Les bruits courraient sur internet mais rien ne filtrait vraiment. N’étant pas dans le secret des dieux j’ai attendu patiemment. Déjà je suis parti 10 jours en Angleterre en juin au moment de l’inauguration de l’exposition. J’ai profité de Londres puis Oxford, Bristol, la Cornouaille, Cardiff et finir par Leeds avec des amis. Mais cela, vous le verrez prochainement.
Le lieu est une ancienne caserne dans le 12eme. Je profite d’un jour de congé pour m’y rendre. J’avais tenté à plusieurs reprises de pouvoir suivre en amont les créations, de voir le lieu se remplir et finalement je me dis que je n’aurai peut-être pas pu venir avant. Le projet Face au mur est une partie du festival Paris Hiphop qui présentent toutes les disciplines autour du Hiphop. Là c’est Lazoo qui a joué le chef d’orchestre et mise en lien les différents artistes.
Je suis rentré en contact avec les organisateurs et j’ai eu une réponse positive. J’ai la possibilité de rencontrer Julien Chowela. J’ai pris le temps de faire le tour, j’ai attendu que le champ soit dégagé pour pouvoir prendre en photo les oeuvres. Je me suis amusé avec le bâtiment, sa vie passée, sa nouvelle, en imaginant que d’ici quelques mois tout ceci serait démoli. L’arc en ciel autour d’une rame de métro rayonne dans toute la salle et ouvre le regard sur les différentes propositions artistiques. Le univers se mêlent, dialoguent, s’apprivoisent, se jouent les uns des autres. La surface est immense, non lisse ce qui rend l’exercice encore plus intéressant.
Je vous laisse découvrir ce lieu étonnant et vous invite vivement à aller y faire un tour car la fin des visites est proche, le 2 août 2015. Courrez y, Entre amis !!! Et pour les plus curieux, lisez ci dessous l’interview de Julien.
Paris Hiphop supervise l’ensemble du festival, les concerts, les rencontres, l’exposition Face au mur, ici dans la caserne.
Julien : Je suis l’un des 3 à l’origine du projet Paris Hiphop et aussi membre de la structure Hip Hop Citoyens qui est la structure porteuse du festival. Je m’occupe principalement de la programmation et de la coordination générale de l’ensemble. Mon domaine est plus la musique. C’est pour cela que sur la danse et le graffiti, on travaille avec des gens comme Lazoo pour le graffiti ou des associations comme Moov’n Aktion pour la danse, qui sont des acteurs plus spécialisés dans leur domaine. Ce n’est pas pour cela que l’on ne programme pas des graffeurs ou des compagnies de danse mais pour Paris Hiphop comme c’est un projet collectif, fédérateur, c’est aussi un moment de mettre en visibilité ceux qui oeuvrent déjà sur ces sujets, en France et à l’international. Cela fait partie de nos envies de créer des projets avec des collectifs, des artistes.
Cela s’appuie aussi sur l’existant, sur le mouvement Hiphop qui a en lui même une densité, qui résonne différemment. C’est donc la 10ème édition.
Cela fait 10 ans. Ce projet Face au mur était une occasion pour nous de marquer le coup, avec un événement un peu particulier pour cet anniversaire. Nous sommes sur toutes ces disciplines du Hiphop (danse, musique, peinture, plastique) mais l’idée pour cette édition était d’être aussi fort dans l’une ou l’autre. Il y a une constante sur la musique dans le festival. On a toujours fait du graffiti ou du street art, dans la rue, sur les murs et des expositions.
Avec des supers têtes d’affiches aussi au niveau musical. La qualité est recherchée de partout.
Ce que l’on veut c’est pouvoir présenter ce qui se fait de meilleur en France et à l’international dans toutes les disciplines et toutes les tendances. Nous avons monté une quinzaine culturelle pour pouvoir montrer tout ça, toutes cette diversité. L’idée est de présenter le meilleur à travers des gros événements comme le Wu Tang Clan qui va jouer au Zenith pour la première fois en Europe avec un Liveband, Youssoupha qui est par là qui va jouer à Clichy sous Bois en plein air. Et en même temps pouvoir proposer des actions plus de fond, culturelles, un cycle de conférences, de rencontres que l’on appelle Paris Hiphop campus, avec des projections cinéma, des documentaires, des fictions. C’est aussi de permettre l’émergence, de faire des ateliers, de proposer des projets dans les quartiers, proches de habitants.
Cela résonne jusqu’où ? Parce que tu dis banlieue, moi je suis du 93, à Aulnay. Est-ce qu’il a commencé dans Paris intramuros et c’est trouver à grossir au fur et à mesure des éditions ?
Dans le projet cela a toujours été écrit que l’on voulait œuvrer sur Paris et sa périphérie, et au delà, sur l’Ile de France. Pour les premières années, c’était surtout une question de moyens. On avait plus d’événements à Paris et 2-3 en banlieue. Grâce au soutien du Conseil Régional d’Ile de France, en 2009 ou 2010, on a pu développer autant d’événements dans et hors Paris. Cela va jusqu’à Clichy sous Bois, Ivry sur Seine, Montreuil, Mantes la ville. Il y a toujours une quinzaine d’événements en Ile de France. Sur Paris nous sommes du Casino de Paris à la Gaité Lyrique en passant par la Maison des Métallos (avec un événement sur toute une journée, avec un salon des activistes, la restitution des ateliers à l’année autour des pratiques du Hiphop). C’est un aspect qui nous tient à cœur de pouvoir autant montrer les ateliers de jeunes, de collégiens et de pouvoir accueillir le Wu Tang Clan, Youssoupha.
Cela tire tout le monde vers le haut et permet de valoriser ce que chacun fait, peu importe d’où la personne part.
J : Ce qui est important, ce sur quoi on essaie de militer, le message à faire passer est qu’après 10 ans de festival le Hiphop et plus de 30 ans d’existence en France, il est temps de reconnaître pleinement le Hiphop comme une composante essentielle de l’Art et de la culture contemporaine. Même si cela avance, que les choses ont beaucoup évolué depuis 2006 et la première édition, cela faisait partie de nos revendications, ouvrir les lieux culturels de la ville de Paris à ces disciplines, à ces artistes alors que certains étaient reconnus sur la scène internationale. Entre temps les choses ont quand même bien bougé : l’Institut du Monde Arabe qui fait une exposition « Du Bronx aux rues arabes », en 2007 nous avions fait des choses au Palais de Tokyo. Depuis, il s’en est passé beaucoup. Aujourd’hui, on en arrive à un stade où des générations d’acteurs comme nous, qui travaillons toute l’année sur ce sujet, sur la consolidation de cette culture, de ces artistes, de ces réseaux de diffusion, sur le repérage de jeunes talents, nous avons encore besoin que ces arts soient reconnus et que nous soyons soutenus comme il faut, que nous puissions continuer notre travail au delà de la 10ème édition.
Cela s’inscrit dans un mouvement contemporain, dans le quotidien des quartiers, dans un vécu qui est lourd de sens aujourd’hui. Que des jeunes puissent être mise en avant au même titre que d’autres arts plus classiques, où il y a un consensus sur le fait que cela puisse être dans un musée ou sur une scène nationale, c’est une vraie militance. Se sont des discours qui ressortent, ce sont des actions qui partent du cœur de certains quartiers populaires.
C’est l’origine de tous ces arts, du graff, du hiphop, du rap. Cela vient des quartiers populaires et cela traverse aujourd’hui tous les milieux. C’est une réalité. Quand on parle de ces artistes réunis ici, des compagnies de danse comme les Wanted Posse qu’on a reçu au casino de Paris, on ne devrait plus se poser la question de leur légitimité. C’est de l’art qu’on aime ou pas, c’est un fait. .La première édition du festival Paris Hiphop en 2006, est aujourd’hui considéré comme l’un des plus grands Street artistes au niveau international.
J’imagine que c’est sur toute l’année que se prépare le festival. Ce qui m’intéresse, sans tout dévoiler, c’est les coulisses, savoir la préparation nécessaire pour cet événement. Cela doit être des petites nuits actuellement. C’est d’une densité j’imagine, sur 15 jours. Entre les différents lieux. Le vernissage de l’expo Face au mur le 19 juin. De gros événements qui brassent du monde.
De monter la quinzaine du Hiphop c’est sur toute l’année. On est une structure relativement petite, avec 4 permanents à l’année. Nous travaillons sur le festival, à 70-80%. On travaille avec peu de moyens, même si on arrive à produire des choses comme ça, de qualité. Nous sommes des activistes passionnés. Mais c’est un combat permanent. De très petites nuits en ce moment, depuis 2 mois un rythme de fou. Toute l’année nous sommes 4, pendant le festival nous sommes 15-20 personnes. Ensuite c’est un réseau de structures, de projets multiformes avec des mairies, des associations, des tourneurs, des structures jeunesses, des collectifs d’artistes. C’est beaucoup de médiation à l’année, beaucoup de temps. Quelque chose de vraiment intéressant à faire, de traiter avec des partenaires aussi différents. C’est de l’ingénierie culturelle à l’année.
C’est un art d’arriver à fédérer tout ce monde. Je pense que beaucoup de gens ne se rendent pas compte. Il n’y a pas longtemps j’ai fait un reportage sur une vente caritative de Street art pour des projets à Madagascar. Ce qui m’a plu c’était de montrer l’envers du décor, la préparation, l’organisation. Tout cela pour quelques heures mais des mois de travail et un avenir qui se crée.
Nous sommes très fiers d’être arrivé à faire 10 éditions. Et c’est vrai qu’un projet comme Face au mur, la première fois que l’on en a discuté avec Paris Habitat qui détienne les murs c’était au mois de septembre 2014. On s’est vu et on a commencé à réfléchir au projet. Après les artistes sont venus travailler sur 2-3 mois, de manière ponctuelle puis plus on se rapprochait de la date, plus il y avait du monde. Tout une aventure humaine aussi.
Cela doit être intéressant. Ce sont des artistes qui n’ont pas forcément le temps et le lieu de se rencontrer. Dans ce genre d’événement, multidisciplinaire, c’est aussi l’occasion de se croiser, d’imaginer de faire des projets ensemble.
Il y a toujours eu ce côté rencontre. Mais depuis 2 ans, on a essayé de concrétiser de manière plus claire cette plateforme internationale dans Paris Hiphop. On fait venir des artistes d’Amérique Latine, d’Afrique, des Etats Unis, de partout dans le monde. Au delà de ce qu’ils font, de leur performance, de leur concert, de leur exposition, on essaie d’organiser des rencontres. Ces acteurs du Hiphop, ces artistes, ces professionnels peuvent donner des conférences, participer à des workshop entre eux. Une des choses que l’on projette de consolider c’est d’ancrer cette plateforme de rencontres internationales du Hiphop. A l’année, on travaille avec le réseau des Alliances Françaises et des Instituts Français. On fait partir des dizaines d’artistes à travers le monde, des graffeurs, des DJs, des danseurs pour faire des tournées. Quand nous partons avec eux, on en profite pour découvrir la scène locale, les acteurs locaux. C’est comme ça que l’on crée des passerelles, des échanges. Cette année, on reçoit des artistes de Colombie, du Liban, de Mongolie, d’Afghanistan. C’est aussi un réseau local sur l’Ile de France à l’année, notamment sur le repérage des jeunes artistes.
C’est un sacré moment de partage créé grâce à vous. Je n’ai pas d’autres questions qui me viennent en tête tout de suite. J’aime beaucoup inverser les rôles donc : aurais tu une question à me poser pour laquelle tu sois assuré que je te réponde et te dise la vérité ?
Donnes moi tes impressions sur l’exposition que tu viens de visiter. Comme je sais que tu es un spécialiste du Street art, cela m’intéresse d’avoir des retours.
Et bien j’affine mes yeux au niveau du Street art. Je ne sais pas si je suis un spécialiste mais passionné c’est sûr. Ce qui m’intéresse dans ce genre de proposition c’est déjà l’utilisation du lieu, de l’architecture. C’est une question qui se pose forcément, malgré le fait que ce soit des artistes qui ont l’habitude de travailler dans la rue. Y’a une belle densité d’artistes, de styles, d’univers différents. Je trouve cela intéressant le côté photos. Dans l’espace central, cet arc en ciel ou presque ce feu d’artifice vient éclater et projeter sur les murs les œuvres. Je suis content de découvrir des artistes que je ne connaissais pas. Cela m’incite à continuer le travail de passeur que je fais sur mon site, d’aller à la rencontre de ces nouveaux artistes, de faire parler certain(e) d’un côté pour que d’autres découvrent des univers, des techniques, des imaginaires d’un autre côté. La réalisation est étonnante, notamment sur la cage de l’ascenseur. Plein de questions en tête : comment les artistes arrivent à réaliser de la 3D ? Comment ils utilisent le support pour sublimer leur œuvre ? Comment les univers viennent se fondre les uns dans les autres ? Je trouve qu’il y a une belle unité.
Là aussi, avec l’ascenseur, on voit la quantité de détails.
Comment malgré le support arriver à ce que de loin on ait la sensation d’être à plat ? En même temps cela crée une dimension nouvelle.
Une de choses qu’a voulu proposer Lazoo c’est d’avoir une œuvre collective. De faire que les fresques et les styles se mélangent. Il a donné de grandes orientations. Il a lancé ces couleurs qui partent de la pièce centrale. Après il y avait une grande liberté laissée à chaque artiste. Venant du graffiti, ils ont l’habitude de se mélanger les uns aux autres. On voit la partie rose qui se reflète dans la partie bleue. Tout cela s’est fait naturellement.
Ce n’est même pas débordé. Cela vient créer la fusion entre les univers.
Cette fresque là, c’est deux artistes. L’un a fait le DJ. L’autre a fait la boucle, la ville. C’est une œuvre collective. Même les artistes New Yorkais au fond. Lazoo a voulu qu’il y avait une rencontre entre les TATS CRU, qui sont une légende aux USA, et SWAY et KALOUF qui ont créé les rames de métro et le gorille. Ce sont des artistes qui malgré leur talent sont très peu médiatisés. C’est une réelle volonté que de les mélanger.
Cela crée une alchimie. Je l’ai vu dans d’autres événements et je pense que cela est vrai pour d’autres arts. Se rencontrer fait que l’on va un peu plus loin soi même, avec l’autre. Des fois, c’est ce type d’événement qui fait qu’ils se retrouvent et qu’ils projettent après l’envie de faire des choses ensemble et se forcer à hybrider parfois leur univers.
C’est assez caractéristique des artistes Hiphop de toutes disciplines confondues. Dans le graffiti c’est souvent des fresques collectives. Lazoo l’expliquerait surement mieux que moi. La démarche était de faire une création collective, un mélange des styles, de venir se nourrir de l’autre.
En tout cas, une belle réussite. Je n’ai pas pu me rendre à des concerts mais ce sera pour la 11ème édition.
Comme je le disais tout à l’heure, c’est là qu’il faut qu’il y ait un déclic, une prise de conscience de la part du Ministère de la Culture pour reconnaître ces arts, ces artistes ainsi que les gens qui travaillent sur ces sujets pour que cela pérennise les projets, leur diffusion.
PS : à venir (après le finissage de cette exposition) une série de panoramas exceptionnels.
Exposition Face au mur – 29 juin 2015
Étiquettes : Street Art
J’avais entendu parler en amont d’un lieu tenu secret qui allait accueillir plusieurs noms du Street art français et international. Les bruits courraient sur internet mais rien ne filtrait vraiment. N’étant pas dans le secret des dieux j’ai attendu patiemment. Déjà je suis parti 10 jours en Angleterre en juin au moment de l’inauguration de l’exposition. J’ai profité de Londres puis Oxford, Bristol, la Cornouaille, Cardiff et finir par Leeds avec des amis. Mais cela, vous le verrez prochainement.
Le lieu est une ancienne caserne dans le 12eme. Je profite d’un jour de congé pour m’y rendre. J’avais tenté à plusieurs reprises de pouvoir suivre en amont les créations, de voir le lieu se remplir et finalement je me dis que je n’aurai peut-être pas pu venir avant. Le projet Face au mur est une partie du festival Paris Hiphop qui présentent toutes les disciplines autour du Hiphop. Là c’est Lazoo qui a joué le chef d’orchestre et mise en lien les différents artistes.
Je suis rentré en contact avec les organisateurs et j’ai eu une réponse positive. J’ai la possibilité de rencontrer Julien Chowela. J’ai pris le temps de faire le tour, j’ai attendu que le champ soit dégagé pour pouvoir prendre en photo les oeuvres. Je me suis amusé avec le bâtiment, sa vie passée, sa nouvelle, en imaginant que d’ici quelques mois tout ceci serait démoli. L’arc en ciel autour d’une rame de métro rayonne dans toute la salle et ouvre le regard sur les différentes propositions artistiques. Le univers se mêlent, dialoguent, s’apprivoisent, se jouent les uns des autres. La surface est immense, non lisse ce qui rend l’exercice encore plus intéressant.
Je vous laisse découvrir ce lieu étonnant et vous invite vivement à aller y faire un tour car la fin des visites est proche, le 2 août 2015. Courrez y, Entre amis !!! Et pour les plus curieux, lisez ci dessous l’interview de Julien.
Paris Hiphop supervise l’ensemble du festival, les concerts, les rencontres, l’exposition Face au mur, ici dans la caserne.
Julien : Je suis l’un des 3 à l’origine du projet Paris Hiphop et aussi membre de la structure Hip Hop Citoyens qui est la structure porteuse du festival. Je m’occupe principalement de la programmation et de la coordination générale de l’ensemble. Mon domaine est plus la musique. C’est pour cela que sur la danse et le graffiti, on travaille avec des gens comme Lazoo pour le graffiti ou des associations comme Moov’n Aktion pour la danse, qui sont des acteurs plus spécialisés dans leur domaine. Ce n’est pas pour cela que l’on ne programme pas des graffeurs ou des compagnies de danse mais pour Paris Hiphop comme c’est un projet collectif, fédérateur, c’est aussi un moment de mettre en visibilité ceux qui oeuvrent déjà sur ces sujets, en France et à l’international. Cela fait partie de nos envies de créer des projets avec des collectifs, des artistes.
Cela s’appuie aussi sur l’existant, sur le mouvement Hiphop qui a en lui même une densité, qui résonne différemment. C’est donc la 10ème édition.
Cela fait 10 ans. Ce projet Face au mur était une occasion pour nous de marquer le coup, avec un événement un peu particulier pour cet anniversaire. Nous sommes sur toutes ces disciplines du Hiphop (danse, musique, peinture, plastique) mais l’idée pour cette édition était d’être aussi fort dans l’une ou l’autre. Il y a une constante sur la musique dans le festival. On a toujours fait du graffiti ou du street art, dans la rue, sur les murs et des expositions.
Avec des supers têtes d’affiches aussi au niveau musical. La qualité est recherchée de partout.
Ce que l’on veut c’est pouvoir présenter ce qui se fait de meilleur en France et à l’international dans toutes les disciplines et toutes les tendances. Nous avons monté une quinzaine culturelle pour pouvoir montrer tout ça, toutes cette diversité. L’idée est de présenter le meilleur à travers des gros événements comme le Wu Tang Clan qui va jouer au Zenith pour la première fois en Europe avec un Liveband, Youssoupha qui est par là qui va jouer à Clichy sous Bois en plein air. Et en même temps pouvoir proposer des actions plus de fond, culturelles, un cycle de conférences, de rencontres que l’on appelle Paris Hiphop campus, avec des projections cinéma, des documentaires, des fictions. C’est aussi de permettre l’émergence, de faire des ateliers, de proposer des projets dans les quartiers, proches de habitants.
Cela résonne jusqu’où ? Parce que tu dis banlieue, moi je suis du 93, à Aulnay. Est-ce qu’il a commencé dans Paris intramuros et c’est trouver à grossir au fur et à mesure des éditions ?
Dans le projet cela a toujours été écrit que l’on voulait œuvrer sur Paris et sa périphérie, et au delà, sur l’Ile de France. Pour les premières années, c’était surtout une question de moyens. On avait plus d’événements à Paris et 2-3 en banlieue. Grâce au soutien du Conseil Régional d’Ile de France, en 2009 ou 2010, on a pu développer autant d’événements dans et hors Paris. Cela va jusqu’à Clichy sous Bois, Ivry sur Seine, Montreuil, Mantes la ville. Il y a toujours une quinzaine d’événements en Ile de France. Sur Paris nous sommes du Casino de Paris à la Gaité Lyrique en passant par la Maison des Métallos (avec un événement sur toute une journée, avec un salon des activistes, la restitution des ateliers à l’année autour des pratiques du Hiphop). C’est un aspect qui nous tient à cœur de pouvoir autant montrer les ateliers de jeunes, de collégiens et de pouvoir accueillir le Wu Tang Clan, Youssoupha.
Cela tire tout le monde vers le haut et permet de valoriser ce que chacun fait, peu importe d’où la personne part.
J : Ce qui est important, ce sur quoi on essaie de militer, le message à faire passer est qu’après 10 ans de festival le Hiphop et plus de 30 ans d’existence en France, il est temps de reconnaître pleinement le Hiphop comme une composante essentielle de l’Art et de la culture contemporaine. Même si cela avance, que les choses ont beaucoup évolué depuis 2006 et la première édition, cela faisait partie de nos revendications, ouvrir les lieux culturels de la ville de Paris à ces disciplines, à ces artistes alors que certains étaient reconnus sur la scène internationale. Entre temps les choses ont quand même bien bougé : l’Institut du Monde Arabe qui fait une exposition « Du Bronx aux rues arabes », en 2007 nous avions fait des choses au Palais de Tokyo. Depuis, il s’en est passé beaucoup. Aujourd’hui, on en arrive à un stade où des générations d’acteurs comme nous, qui travaillons toute l’année sur ce sujet, sur la consolidation de cette culture, de ces artistes, de ces réseaux de diffusion, sur le repérage de jeunes talents, nous avons encore besoin que ces arts soient reconnus et que nous soyons soutenus comme il faut, que nous puissions continuer notre travail au delà de la 10ème édition.
Cela s’inscrit dans un mouvement contemporain, dans le quotidien des quartiers, dans un vécu qui est lourd de sens aujourd’hui. Que des jeunes puissent être mise en avant au même titre que d’autres arts plus classiques, où il y a un consensus sur le fait que cela puisse être dans un musée ou sur une scène nationale, c’est une vraie militance. Se sont des discours qui ressortent, ce sont des actions qui partent du cœur de certains quartiers populaires.
C’est l’origine de tous ces arts, du graff, du hiphop, du rap. Cela vient des quartiers populaires et cela traverse aujourd’hui tous les milieux. C’est une réalité. Quand on parle de ces artistes réunis ici, des compagnies de danse comme les Wanted Posse qu’on a reçu au casino de Paris, on ne devrait plus se poser la question de leur légitimité. C’est de l’art qu’on aime ou pas, c’est un fait. .La première édition du festival Paris Hiphop en 2006, est aujourd’hui considéré comme l’un des plus grands Street artistes au niveau international.
J’imagine que c’est sur toute l’année que se prépare le festival. Ce qui m’intéresse, sans tout dévoiler, c’est les coulisses, savoir la préparation nécessaire pour cet événement. Cela doit être des petites nuits actuellement. C’est d’une densité j’imagine, sur 15 jours. Entre les différents lieux. Le vernissage de l’expo Face au mur le 19 juin. De gros événements qui brassent du monde.
De monter la quinzaine du Hiphop c’est sur toute l’année. On est une structure relativement petite, avec 4 permanents à l’année. Nous travaillons sur le festival, à 70-80%. On travaille avec peu de moyens, même si on arrive à produire des choses comme ça, de qualité. Nous sommes des activistes passionnés. Mais c’est un combat permanent. De très petites nuits en ce moment, depuis 2 mois un rythme de fou. Toute l’année nous sommes 4, pendant le festival nous sommes 15-20 personnes. Ensuite c’est un réseau de structures, de projets multiformes avec des mairies, des associations, des tourneurs, des structures jeunesses, des collectifs d’artistes. C’est beaucoup de médiation à l’année, beaucoup de temps. Quelque chose de vraiment intéressant à faire, de traiter avec des partenaires aussi différents. C’est de l’ingénierie culturelle à l’année.
C’est un art d’arriver à fédérer tout ce monde. Je pense que beaucoup de gens ne se rendent pas compte. Il n’y a pas longtemps j’ai fait un reportage sur une vente caritative de Street art pour des projets à Madagascar. Ce qui m’a plu c’était de montrer l’envers du décor, la préparation, l’organisation. Tout cela pour quelques heures mais des mois de travail et un avenir qui se crée.
Nous sommes très fiers d’être arrivé à faire 10 éditions. Et c’est vrai qu’un projet comme Face au mur, la première fois que l’on en a discuté avec Paris Habitat qui détienne les murs c’était au mois de septembre 2014. On s’est vu et on a commencé à réfléchir au projet. Après les artistes sont venus travailler sur 2-3 mois, de manière ponctuelle puis plus on se rapprochait de la date, plus il y avait du monde. Tout une aventure humaine aussi.
Cela doit être intéressant. Ce sont des artistes qui n’ont pas forcément le temps et le lieu de se rencontrer. Dans ce genre d’événement, multidisciplinaire, c’est aussi l’occasion de se croiser, d’imaginer de faire des projets ensemble.
Il y a toujours eu ce côté rencontre. Mais depuis 2 ans, on a essayé de concrétiser de manière plus claire cette plateforme internationale dans Paris Hiphop. On fait venir des artistes d’Amérique Latine, d’Afrique, des Etats Unis, de partout dans le monde. Au delà de ce qu’ils font, de leur performance, de leur concert, de leur exposition, on essaie d’organiser des rencontres. Ces acteurs du Hiphop, ces artistes, ces professionnels peuvent donner des conférences, participer à des workshop entre eux. Une des choses que l’on projette de consolider c’est d’ancrer cette plateforme de rencontres internationales du Hiphop. A l’année, on travaille avec le réseau des Alliances Françaises et des Instituts Français. On fait partir des dizaines d’artistes à travers le monde, des graffeurs, des DJs, des danseurs pour faire des tournées. Quand nous partons avec eux, on en profite pour découvrir la scène locale, les acteurs locaux. C’est comme ça que l’on crée des passerelles, des échanges. Cette année, on reçoit des artistes de Colombie, du Liban, de Mongolie, d’Afghanistan. C’est aussi un réseau local sur l’Ile de France à l’année, notamment sur le repérage des jeunes artistes.
C’est un sacré moment de partage créé grâce à vous. Je n’ai pas d’autres questions qui me viennent en tête tout de suite. J’aime beaucoup inverser les rôles donc : aurais tu une question à me poser pour laquelle tu sois assuré que je te réponde et te dise la vérité ?
Donnes moi tes impressions sur l’exposition que tu viens de visiter. Comme je sais que tu es un spécialiste du Street art, cela m’intéresse d’avoir des retours.
Et bien j’affine mes yeux au niveau du Street art. Je ne sais pas si je suis un spécialiste mais passionné c’est sûr. Ce qui m’intéresse dans ce genre de proposition c’est déjà l’utilisation du lieu, de l’architecture. C’est une question qui se pose forcément, malgré le fait que ce soit des artistes qui ont l’habitude de travailler dans la rue. Y’a une belle densité d’artistes, de styles, d’univers différents. Je trouve cela intéressant le côté photos. Dans l’espace central, cet arc en ciel ou presque ce feu d’artifice vient éclater et projeter sur les murs les œuvres. Je suis content de découvrir des artistes que je ne connaissais pas. Cela m’incite à continuer le travail de passeur que je fais sur mon site, d’aller à la rencontre de ces nouveaux artistes, de faire parler certain(e) d’un côté pour que d’autres découvrent des univers, des techniques, des imaginaires d’un autre côté. La réalisation est étonnante, notamment sur la cage de l’ascenseur. Plein de questions en tête : comment les artistes arrivent à réaliser de la 3D ? Comment ils utilisent le support pour sublimer leur œuvre ? Comment les univers viennent se fondre les uns dans les autres ? Je trouve qu’il y a une belle unité.
Là aussi, avec l’ascenseur, on voit la quantité de détails.
Comment malgré le support arriver à ce que de loin on ait la sensation d’être à plat ? En même temps cela crée une dimension nouvelle.
Une de choses qu’a voulu proposer Lazoo c’est d’avoir une œuvre collective. De faire que les fresques et les styles se mélangent. Il a donné de grandes orientations. Il a lancé ces couleurs qui partent de la pièce centrale. Après il y avait une grande liberté laissée à chaque artiste. Venant du graffiti, ils ont l’habitude de se mélanger les uns aux autres. On voit la partie rose qui se reflète dans la partie bleue. Tout cela s’est fait naturellement.
Ce n’est même pas débordé. Cela vient créer la fusion entre les univers.
Cette fresque là, c’est deux artistes. L’un a fait le DJ. L’autre a fait la boucle, la ville. C’est une œuvre collective. Même les artistes New Yorkais au fond. Lazoo a voulu qu’il y avait une rencontre entre les TATS CRU, qui sont une légende aux USA, et SWAY et KALOUF qui ont créé les rames de métro et le gorille. Ce sont des artistes qui malgré leur talent sont très peu médiatisés. C’est une réelle volonté que de les mélanger.
Cela crée une alchimie. Je l’ai vu dans d’autres événements et je pense que cela est vrai pour d’autres arts. Se rencontrer fait que l’on va un peu plus loin soi même, avec l’autre. Des fois, c’est ce type d’événement qui fait qu’ils se retrouvent et qu’ils projettent après l’envie de faire des choses ensemble et se forcer à hybrider parfois leur univers.
C’est assez caractéristique des artistes Hiphop de toutes disciplines confondues. Dans le graffiti c’est souvent des fresques collectives. Lazoo l’expliquerait surement mieux que moi. La démarche était de faire une création collective, un mélange des styles, de venir se nourrir de l’autre.
En tout cas, une belle réussite. Je n’ai pas pu me rendre à des concerts mais ce sera pour la 11ème édition.
Comme je le disais tout à l’heure, c’est là qu’il faut qu’il y ait un déclic, une prise de conscience de la part du Ministère de la Culture pour reconnaître ces arts, ces artistes ainsi que les gens qui travaillent sur ces sujets pour que cela pérennise les projets, leur diffusion.
PS : à venir (après le finissage de cette exposition) une série de panoramas exceptionnels.