Interview de Kélèk

J’avais déjà vu une œuvre. Mais presque comme un coup de vent. Je ne connais pas grand chose de cet artiste et c’est bien ça qui me plait dans cette nouvelle rencontre. Sera-t-il/elle me donner envie de découvrir son univers, de m’intéresser à ses créations? Serai-je suffisamment pertinent pour créer un pont avec l’inconnu?

Le contact s’est fait via Facebook. Cela rend les choses faciles. Nous prévoyons de faire l’interview pendant sa venue parisienne. Est-ce qu’il/elle a déjà lu une interview et souhaite-t-il/elle se prêter au jeu?

Je suis en chemin. RDV au Point Éphémère, 29 avril 2014, à 15h. Il/elle est de passage sur Paris pour quelques jours. Je suis disponible. La dernière interview est en ligne depuis hier donc je peux passer à une autre. Je suis curieux de discuter avec lui/elle et d’en apprendre d’avantage.

J’assiste au collage d’un monstross. Puis nous nous mettons à table, autour d’une bière. Hélas, la technique m’a fait défaut : l’enregistrement s’est arrêté sans que je m’en rende compte et 30 minutes d’interview sont partie en fumée. Heureusement Kélèk lance l’idée de la refaire toute de suite. Voilà pourquoi les questions ou les réponses seront plus que curieusement pendant la moitié de l’interview. Il faut apprendre de toute expérience.

Vous pouvez également retrouver Kélèk pour sa première expo dans le cadre des Portes O’vertes du Chène, à Villejuif. Evénément à retrouver ici.


Enregistrement numéro 2, salut la machine.

Je suis un boulet.

Clément est un boulet, je viens de le rencontrer et l’enregistrement a sauté. Il n’a rien vu, c’est un boulet. (rires)

On redémarre et on va essayer de refaire cette interview.

Pseudo : Kélèk

Site internet : On peut me trouver sur ma page Facebook

Comme je te le disais tout à l’heure, c’est un palindrome, un mot qui se lie dans un sens comme dans l’autre. Qu’est-ce que cela signifie ?

Alors palindrome. Déjà c’est un mot bizarre. Y’a Drôme dedans. C’est beau la Drôme. Comment est venu Kélèk ? C’est rigolo de faire deux fois la même chose. (rires)

C’est ça. On devient complètement taré. Faudrait que l’on trouve un moyen. Mais c’est très drôle.

Ouai. Kélèk est venu dans ma tête, comme ça. Juste le nom. J’ai, vite fait, essayé de savoir pourquoi et qu’est-ce qu’il pouvait bien signifier. Parce que cela ne sonnait pas français. Je pensais que cela venait des pays de l’Est. Kélèk. Mais je ne me suis pas enlisé dans la recherche. Puis j’ai parlé avec quelqu’un qui m’a dit « regardes ça à des consonances aztèques avec les K ». Alors je sais pas, j’ai dit oui. Et vu que j’ai des fortes attirances pour les civilisations anciennes comme les Aztèques, Mayas, Egyptiens, je me suis dit pourquoi pas.

Tout à l’heure, tu me parlais de sa forme, au niveau géométrique.

Oui. Lorsque je l’ai écrit, j’ai remarqué que le é et le è ressemblaient à des yeux. Les accents comme des sourcils sur des yeux. Il y a des gens qui utilisent ça sur le net, genre é_è. Ça dessine des p’tits bonhommes. Puis j’ai vu le L qui formait le nez et les deux K, dont un des deux est inversé, les oreilles. Mais des oreilles bizarres, un peu extraterrestres t’as vu, J’aime bien les extraterrestres. Y’en a des très sympas. Donc les K comment des pavillons grand ouverts, pour bien tout capter. Il est pas endormi le machin.

Age : Alors j’ai eu 2642 ans. Le 19 avril.

Bon anniversaire en retard 😉

Site internet : 

1ere fois sur un mur : Il y a moins d’un an. J’ai commencé à coller en août mais pas du Kélèk. Je crois que le premier Kélèk s’est posé à Monptellier. Il faudrait vérifier ça sur ma page Facebook. Mais voilà, c’est tout jeune.

Dernière fois sur un mur, c’était là maintenant, il y a quelques minutes devant moi : Oui. Un montross Kélèk. Avec deux s à la fin. A mon dernier passage sur Paris, je voulais en coller un ici, au Point Ephémère mais j’en avais plus. Partie remise. Et Hop.

Tiens regarde (en montrant une œuvre sur le mur). C’est un dessin de Saint Oma. Je kiffe ce qu’il fait.

On parlait toute à l’heure, comme on est en train de recommencer…

Peut être que tu ne vas pas dire que l’on a raté l’enregistrement. En même temps cela pourrait être rigolo de dire que ça n’a pas enregistré, que l’on a parlé pendant 30 minutes avant de se rendre compte que la machine s’était mystérieusement arrêtée. Il m’arrive souvent des trucs comme ça. Avec les gens, des situations bizarres. Donc vérifie parce que l’on ne va pas la faire 3 fois. (rires)

On est au taquet. La technique par en vrille qu’une fois. Alors les lieux de prédilection : tu disais que tu te laissais porter.

Il n’y a pas de lieux de prédilection. Il faut que cela aille avec l’ambiance du concept que je mets sur le mur. Kélèk représente un côté sombre, il est pas très gai quand même. J’aime bien les murs abimés, qui ont vécu. J’aime bien la matière. J’ai bossé en déco de spectacle, à reproduire des murs, à bosser les patines, à donnes des aspects « vieux murs », des trucs qui se cassent un peu la gueule, écorchés. Kélèk il va bien avec ça.

Quand je vais coller, je marche 4-5 heures par jour, je me laisse guider, je déambule. Je scrute les murs et dès que je trouve l’environnement, le bon emplacement, Hop je pose un Kélèk. Sans faire gaffe s’il va y avoir du passage ou pas, sans calculer l’arrondissement. Je m’en fous. Kélèk trouve sa place. Il va vivre là, sur ce mur. C’est ça l’important.

Un peu, ici et maintenant. En se baladant, spontanément. De se dire…

Ben je me dis pas en fait. C’est tout sur le ressenti. Donc je me mets en mode pas réfléchir, je marche et c’est que mes yeux qui fonctionnent à fond. Et le truc à l’intérieur de moi qui va me dire « c’est là ». Point barre. Je colle et je prends la photo. En matant la photo, je vois qu’effectivement il y a quelque chose qui vit là. Que ce soit par la suite arraché, recouvert, etc, je m’en fous. C’est ce moment là, il y a un accompagnement qui se fait et c’est tout.

Définition : Je vis, je crée. Je ne crée pas, c’est pas rigolo, donc je meurs. Et la création, pour moi, c’est aussi cuisiner ou jardiner, faire un morceau de zik, un texte, des vêtements. Tout est création. Je ne peux pas faire sans. La création est la vie, et inversement. Je suis création depuis l’enfance.

Se laisser porter, comme tu le disais tout à l’heure, expérimenter plein de choses, ne jamais s’arrêter.

Ouai. Faire plein de boulots différents, faire plein de choses. Tous les jours, tout le temps quelque chose de nouveau. Apprendre, apprendre, apprendre. Expérimenter.

Là j’ai envie d’apprendre à faire du skate. J’ai fait une vidéo de skate pour un concours et le fait de faire la vidéo, de chercher les skateurs, de les  voir en train d’en faire, en regardant par la machine, j’ai vu comment ils posaient leur pied, leur poids, les gestes, l’accompagnement des bras, tout, le moment où ils vont lever la planche pour faire une figure. J’apprends comme ça aussi. Et ça m’a donné envie de tester. Même si je sais que j’ai plus l’âge pour ça, que je vais tomber et me faire super mal. Peut être ou pas mais j’ai quand même envie.

Dans la vie il faut expérimenter un maximum, sinon ce n’est pas intéressant. Que ce soit avec tous les médiums pour le pictural, ou tout les styles pour la musique, et dans tous les états, avec l’alcool, les drogues, sans avoir manger ou sans avoir dormi depuis deux jours. Expérimenter avec le corps et l’esprit qui n’a pas dormi, ce qu’il ressent, c’est énorme. C’est un jeu, c’est la vie. Bon bien sûr il faut faire attention. C’est pas parce que je vais tester l’alcool pendant un certain temps que je vais devenir alcoolique, je sais arrêter aussi vite que j’ai commencé. C’est juste expérimenté. C’est énorme d’être dans des états extrêmes et de jouer avec la création dans ses moments là. J’adore.

Mais cela met dans des états dans lesquels la création peut, pour toi,  s’exprimer.

Elle s’exprime. Cela peut déverrouiller des choses qui sont endormies ou qui ont besoin de ça pour s’exprimer. Comme quand on est en colère ou quand on est amoureux. Ce sont des états. J’aime bien utiliser tout ça. Cela peut m’aider à créer ce que je n’arriverais pas à faire sans.

J’ai un esprit très créatif. Je le laisse faire. Et plus je le laisse faire, plus il est créatif. C’est un peu comme un enfant. Je laisse l’enfant faire leurs expériences, sauf si c’est dangereux pour eux bien sûr. J’ai des cahiers dans lesquels j’écris, je dessine tout ce qui me passe par la tête pour ne pas oublier parce qu’il est tout le temps en train de me trouver de nouveaux trucs. Je vais utiliser, faire naître certaines de ses idées, d’autres vont évoluer sur le papier avant de sortir, d’autres encore ne sortiront jamais du papier. Mais il faut que je sorte tout ça de ma tête sinon c’est trop le bordel là dedans, ça gueule que ça veut sortir (rires)

J’appelle ça des concepts, que ce soit vidéo, musical, pictural, Street art, tout ce que l’on veut dans l’artistique. Je peux entendre des sons et ça va me donner une idée de vidéo. Bon c’est souvent un peu bizarre ce que je fais, je capte pas tout. Des fois les autres déchiffrent pour moi ce que j’ai fait. Ou alors ils ne comprennent pas ce que j’ai voulu exprimer quand moi j’ai compris et que ça me parait évident.

Tu regardes si ça enregistre et je veux bien une autre bière. Tu mets sur pause.

(5 minutes plus tard) Je pensais à un truc aussi. J’ai besoin d’être en interaction tout le temps avec ce qu’il y a autour de moi, pas forcément la ville, les gens, mais la nature aussi, le bordel qu’il y a chez moi et avec lequel je crée, la musique que je vais écouter quand je crée.

Une ébullition.

Je crois en l’astrologie. Je suis signe de feu deux fois, signe et ascendant le même. Donc ça swing. Cela explique pas mal de chose, de ce que je suis, à y aller, à foncer, à vouloir faire des choses avec les autres, à les faire bouger le cul ou la tête. Tout le monde crée et peut faire quelque chose d’artistique. C’est important et ça fait énormément de bien. Et on le fait pas assez, malheureusement.

Au niveau de ce que tu fais, ton univers, comment tu te définis? Comment est arrivé Kélèk ?

Alors Kélèk est une tête de mort pas morte, qui est peinte au pinceau, sans préparation, je veux dire sans tracé au préalable. J’utilise juste plusieurs positions du crâne et elle vient se placer sur un fond papier glacé de livre que j’achète chez Emmaus, au Secours Populaire ou Catholique ou autre.

C’est donc une tête de mort qui vit par les expressions qui vont apparaître grâce aux traits que je vais poser en rouge, blanc ou noir. Je ne les calcule pas, je laisse ma main faire. Chaque tête de mort va avoir une expression différente. Et elles vont dénoncer ce que fait l’être humain de mal, sur son environnement, les animaux, les autres humains, par l’image sur le papier glacé. Donc le nom de Kélèk est d’abord arrivé dans mon esprit, puis l’image de ses têtes de morts qui devaient se poser sur ces photos, de destructions, de guerres, de manipulations, de politique, d’expériences sur les animaux, de morts des animaux, de catastrophes naturels mais qui sont peut être dû à l’impact de l’être humain sur son environnement etc.

Par les couleurs aussi qui sont utilisées, cela ressort. Le rouge, le sang ; le noir, la mort, l’ombre, le mauvais côté ; le blanc, la mort, la lumière de la mort, on dit toujours au bout du tunnel il y la lumière, cela fait partie de la mort. Et en même temps c’est la lumière que KÉLÈK veut montrer et qu’il faut atteindre. Il montre la destruction parce qu’il faut arrêter de détruire, et aller vers la lumière.

Et donc de dénoncer des situations, des atrocités, des choses sur lesquelles la société ne regarde pas vraiment, ne se regarde pas. Tu disais toute à l’heure que le système veut oublier ou cacher certaines parties.

Oui et non. On a des fêtes nationales pour ne pas oublier. Mais, en même temps, il y a tellement d’autre choses qui se passent maintenant, pourquoi rester bloqués sur le passé puisque apparemment ces faits du passé n’empêchent pas que des atrocités continuent de se faire, d’exister. Kélèk aimerait qu’on arrête les faux semblants, l’hypocrisie, la manipulation des masses par la politique, les médias, l’école, le boulot.

Comment font les gens pour se nourrir avec de la bouffe faite en usine, pour donner ça à manger à leurs enfants, tout en sachant ce qu’il y a dedans ? Que c’est du poison. Savoir qu’ils s’empoisonnent et empoisonnent les enfants, à qui l’on devrait donner le meilleur. Les gens préfèrent se voiler la face, subir ce qui n’est pas bon pour eux, s’identifier a des modes, des façons de vivre qui ne sont pas eux.

KÉLÈK pointe certaines réalités pour les mettre en avant, faire que les gens regardent ça.

Oui, il a pointé les problèmes en Amazonie, la déforestation. Les guerres, les religions. Il y a tellement de choses qui ne vont pas dans le monde, on dirait que c’est infini. Et Kélèk n’est pas encore bien réveillé, il vient juste d’arriver. J’ai eu d’autres projets qui m’ont occupée, je l’ai mis un peu de coté. Mais j’ai environ 800 pages d’image papier glacé qui attendent Kélèk. Je vais m’en occuper très prochainement. Déjà pour l’expo à laquelle il va participer fin mai à Paris et aussi parce qu’il a tellement à dire encore, de manière plus trash je crois. Il doit s’exprimer, sortir la colère qu’il a en moi. C’est mon coté masculin, le guerrier, il faut qu’il sorte pour que je retrouve un peu de paix intérieure. Je ne peux pas le laisser gueuler en moi comme il le fait, c’est fatiguant (rires)

Il interpelle dans la rue.

Je pense qu’il dérange. Il est pas très gai. Et les gens veulent de la gaité pour oublier l’horreur. Ils veulent du bonheur, de la pommade. Oui tout va bien, tout est rose. Ouai c’est ça, pas du tout. Bien sûr qu’il y a plein de belles choses, tous les jours. Mais si on laisse faire l’horreur, qui est bien trop présente, toute la merde risque de noyer tous ces bonheurs si ça continue.

Et donc que sont les monstross, qui sont des personnages qui accompagnent Kélèk ?

Ils ne sont pas venus tout de suite, enfin pas dès le début. Ils sont plus liés à la bande dessinée dans laquelle je m’étais enfermée étant petite pour fuir le monde des adultes, des humains qui ne me plaisait pas. J’ai fait un block out à 4 ans, je me suis enfermée dans une bulle où n’existaient que la BD, la musique, la nature et les animaux. La BD était surtout fantastique, de science fiction. Je kiffais les monstres, les insectes, les images de bestioles que l’on pouvait voir qu’avec un microscope. Les animaux, leur morphologie, leurs iris, leurs dents. Encore maintenant ça me passionne.

Les monstross Kélèk sont un peu comme des fantômes, au corps torturé, blafard, sans vraiment de membres, juste des espèces de tentacules, de grandes dents, un sourire qui n’en est pas vraiment un. En même temps, ils n’ont pas l’air méchant, ils sont un peu dérangeants. C’est un peu comme s’ils étaient sympas mais qu’il ne fallait quand même pas le chercher, le faire chier. Un peu comme moi, je suis sympa mais il faut pas pousser sinon gaffe.

Ils ont une vie de famille, je les représente en couple, avec des enfants, ils vivent comme tous ce qui vit sur terre, ce que l’on voit et ce que beaucoup ne voit pas. Ils vivent très longtemps, ne craignent rien, ils sont trop forts.

Est-ce que tu as une actualité ? Tu me disais qu’il y avait un événement qui arrivait à la fin du mois.

On m’a proposé de participer à une exposition, au Chêne, à Villejuif. C’est un lieu alternatif, de création, qui a des ateliers et qui accueille des artistes en résidence. Il y aura environ 70 artistes qui exposeront. Ce sera la première exposition de Kélèk.

Je participe aussi, avec un autre pseudo, à une exposition collective à L’Onyx à Bagnolet. Et une autre encore avec un autre pseudo, dans le 13ème au centre d’animation Goscinny. Ces deux là débutent dans quelques jours.

Raconte moi ton histoire : Qu’est ce qui est important de connaitre de ton parcours personnel, professionnel ou artistique pour comprendre ton travail aujourd’hui? Quelles sont les étapes qui t’ont faite devenir KÉLÈK ?

Mon parcours artistique s’est fait par les Arts Appliqués à Sèvres, puis à Duperré, puis en école d’architecture. Je voulais travailler dans la déco de spectacles, créer des mondes, mais je me suis ennuyée dans tous ces établissements, je n’apprenais pas grand-chose. J’étais souvent hors sujet, je partais dans des délires. En archi c’était la mode des gros cubes en béton banché et moi, je faisais des architectures rondes en bois, rien à voir avec ce que l’on nous demandait. Certains profs kiffaient mes délires mais je ne faisais pas ce qu’on me demandait. Je n’ai fait que 2 ans sur 3, c’était trop sérieux, trop froid pour moi.

Je créais depuis l’enfance, je suis née avec la création en moi. J’étais une mauvaise élève sauf en dessin, je kiffais aussi un peu les sciences naturelles et la science physique. Et une année, en seconde je crois, le cours d’anglais parce que le prof était passionné de cinéma et nous apprenait l’anglais en matant de bon vieux films en noir et blanc. Il nous montrait comment les décrypter, les mouvements de caméra, les lumières, la réalisation, le scénario etc. On regardait beaucoup de film d’Orson Wells et de Hitchcock, je ne ratais pas un « cinéma de minuit ».

Kélèk est venu avec la musique et toute la rage que j’avais en moi, que j’ai enfermé jusqu’à maintenant. Quand j’étais ado et que j’ai décidé de sortir de la bulle dans laquelle je m’étais enfermée pendant l’enfance, je me suis révoltée contre tout. J’écoutais beaucoup de musique punk, métal, rock. Pas que ça mais c’était très présent. Je m’habillais qu’en noir, j’étais très solitaire, j’étais contre le système, l’école, les parents. Kélèk est cette partie rebelle, qui ne veut pas agresser les autres, ne veut pas faire de mal mais dire « réveillez vous !». Il veut des prises de conscience, du mouvement dans les têtes, du changement des mentalités.

Oser dire les choses, montrer les choses.

Il faut s’exprimer. Il faut dire ce que l’on pense, quand on n’est pas content, quand on est content. Par rapport à tout et à tout le monde.

Un enseignement artistique mais quand tu croulais sous les consignes, cela n’allait pas.

J’ai beaucoup de mal avec la hiérarchie, oui. J’ai souvent eu des problèmes dans les tafs que j’ai fait, en pointant ce qui n’allait pas. Et les gens, surtout les patrons, n’aiment pas ça… J’ai pas appris grand chose dans les écoles, à part en archi, les coupes, plans, élévations, perspectives et maquettes. Le reste j’avais l’impression de l’avoir déjà en moi. Alors je m’ennuyais et j’aime pas m’ennuyer. Quand je m’ennuie, je fous le bordel ou je me casse. C’est ce que j’ai fait dans les écoles où je suis passée.

Regarde si ça enregistre toujours.

Plein de matériaux, plein de techniques.

C’est toujours l’expérimentation, avec les matériaux et les techniques. La récup c’est un truc important pour moi. Il y a tellement de gaspillage, tellement de matériaux, d’objets qui peuvent avoir une deuxième vie. Alors je fouille dans les poubelles, les bennes. Je récupère ce qu’il y a sur les trottoirs, si ça peut me servir bien sûr. Je peux m’exprimer sur n’importe quels supports. J’achète aussi du matos, un peu, dans les magasins de bricolages, d’art.

Sur les matériaux en eux même, tu utilises des feutres, de la peinture, des bombes ?

Je découvre les Poscas et les bombes. Bon les bombes, ça me fait un peu chier parce que c’est polluant. Mais je ne fais pas de graff, je les utilises pour faire du pochoir, méthode que j’expérimente depuis quelques mois. Je kiff ça, c’est un sacré taf, surtout de découpe.

Sur des supports variés ? Toute à l’heure tu racontais, le fait d’avoir fait un KÉLÈK sur un support nouveau.

Kélèk va évoluer ou peut être disparaître, je ne sais pas. En tout cas il y aura évolution. Sans ça, je meurs. Donc il y a toujours eu du mouvement dans mes créations. Il faut que ça change, que ça tourne, que ça bouge.

A mon dernier passage à Paris, le pote qui m’hébergeait avait trouvé une plaque de métal rouillée dans la rue. Il voulait l’envoyer à un ami, ça devait protéger un disque. Bref, il m’a demandé si je voulais faire un Kélèk dessus, j’ai dit oui. J’ai toujours envie, besoin de créer, sur tout et rien, ça a toujours été comme ça. Partout où je passais, squat, hébergement, je peignais sur les murs (fresque), sur les meubles, sur des supports de toutes sortes. Et je laissais ça derrière moi après, je m’en foutais, il fallait que je crée c’est tout. Et donc cette fois là, j’ai dit oui, j’avais envie, il m’a trouvé des Posca et hop, j’ai fait la première tête de mort Kélèk sans un fond photo et ça la fait. La rouille qui ronge, la destruction, comme du sang séché un peu, c’est Kélèk aussi.

Prolonger le travail de KÉLÈK sur de nouveaux supports mais en même temps cela sert ce qu’il a à dire.

Oui. Mais pas faire que ça. Continuer l’autre aussi, encore en plus trash. Je pense qu’il y a des choses plus trash qui vont arriver. L’évolution du concept. Je ne dit pas tout, top secret.

Le mode opératoire est très spontané. De jour ou de nuit ? suivant tes disponibilités, avec ton chariot ?

Je prépare tout chez moi avant. Pas le temps de créer sur place, entre les rendez vous, le collage, trop de trucs a faire. Sauf les commandes qui viennent quand je suis dans la place, si je peux. Je marche entre 4 et 5 h par jour pour coller. Je ne sais pas ce qui va venir sur mon chemin, une rencontre, une expo, la pluie. Si je le sens de nuit ou de jour, ça dépend comment je le sens au jour le jour. Là j’ai 124 pièces d’un autre concept, une autre signature à poser sur les murs, plus les Kélèk et d’autres trucs.

Spontanément ou cela peut t’arriver comme là pour le Point Ephémère, de le prévoir ?

Les deux. Quand je vois des pièces d’artistes que je kiffe et que je peux accompagner sans les envahir, je le fais. J’ai posé à coté d’une pièce de Kashink cet été. Du coup les deux pièces ont discuté, ça le faisait trop. J’accompagne souvent Fred le Chevalier. La première fois qu’on s’est accompagné c’était à Avignon. Il était passé après moi et avait collé à coté de moi, racontant une nouvelle histoire, c’était cool. Je croise souvent ces collages abimés ou déchirés, je les répare en remettant de la colle, je le fais pour d’autres aussi. Une fois son collage avait la tête arrachée, j’ai mis un de mes collages comme nouvelle tête pour faire revivre la pièce.

C’est quand même rare que je prévoie de coller à tel ou tel endroit, ça se fait au fil de ma balade. Accompagner les murs et les autres, sans les bouffer, toute la famille de la rues, graff, tag, stickers etc. Je respecte, je vais pas toyer. C’est plus rigolo d’accompagner, de créer une nouvelle histoire. C’est la vie.

Quelles sont les villes où tu as déjà œuvré ?

J’ai commencé par Grenoble je crois, Avignon, Montpellier, Toulouse, Bordeaux, Cahors, Rennes, Paris, partout où je passe si je peux.

On va avancer et essayer de ne pas se mettre en retard pour le vernissage.

T’inquiètes, il n’y a jamais de retard. Franchement. (rires)

La dimension engagement : Est-ce que dessiner sur les murs, c’est pour questionner les habitants au sein d’une cité ? Est-ce que ce rôle là est important pour toi ?

Oui, bien sur. J’ai commencé par faire des tableaux, sous un autre pseudo. J’ai fait la même chose pendant 15 ans, en évoluant doucement, rien à voir avec ce que je fais maintenant. En exposant, vendant, j’en vivais à un moment. Et je suis rentrée en France, j’ai arrêté de peindre, j’ai fait un break. J’avais pas du tout envie de rentrer dans le circuit des galeries que je connaissais ici, pas envie de me battre. J’ai continué de créer parce que je ne peux pas m’en empêcher, mais je bricolais plutôt et je me suis surtout penché vers la musique, c’était le moment pour ça. Alors j’ai commencé à tester la MAO, et la vidéo.

Et un jour, j’ai demandé à un pote via le net de me faire un dessin. Il l’a fait, je lui en ai fait un. Puis c’est devenu un jeu, ping-pong. J’ai eu un déclic, Je devais coller tout ça sur les murs. Une révélation. Et je l’ai fait, c’était des monstross bien sûr. J’ai trouvé un mec qui m’a filé son appart 15 jours et sa carte vélib, sans me connaître, le top. Je trouve des gens via le net qui m’hébergent, c’est un peu osé mais c’est la vie, l’interaction. J’ai kiffé le fait de donner sur les murs, de ne pas passer par les galeries, de mettre de la couleur et des trucs qui font rire aux gens, de toucher les enfants, leur amener quelque chose en dehors de leur maison, de leur école, de leurs livres. Un clin d’oeil. La liberté de faire ça même si c’est interdit, l’adrénaline que ça procure aussi, c’est l’aventure.

Et Kélèk après c’était évident aussi qu’il soit sur les murs.

Ah ben oui. Je suivais ce chemin, de donner aux gens. Là pas de la joie ou de la bonne humeur, mais du bousculage de conscience. Kélèk est né, il devait sortir de ma tête. Je ne pouvais pas ne pas le faire. C’était une évidence. Il va évoluer dans le mois qui arrive, j’ai tout dans ma tête. Les supports sont prêts. En tout cas, il va en expo maintenant. Il suit son chemin. Je laisse faire.

Tu parlais toute à l’heure du côté partage, de ce que tu avais envie de donner. Effectivement, l’envie de faire changer les choses, de faire prendre conscience, d’aspirer à ce que l’on arrête de se voiler la face.

En fait, comme je disais, dans mon travail comme dans ma vie, c’est tout le temps en mouvement, en évolution, en prise de conscience, des choses que j’applique dans ma vie, en interaction avec les gens. J’arrive pas à concevoir que l’on soit en vie et que l’on reste toujours au même stade. Que ce soit au niveau du boulot, dans un couple, au niveau des enfants. Y’a une évolution. Sinon ça sert à quoi de vivre.  La vie est un travail, tout le temps. C’est dur, c’est fatiguant. C’est beau aussi d’évoluer, de prendre conscience, de partager, d’aider les autres à prendre conscience. C’est important. On est là pour aider les autres. On est tous dans la vie, dans le même monde, la terre, on est de la même famille.

Tu parles d’entraide. Tu disais toute à l’heure que tu recevais beaucoup chez toi. D’être accueillante.

On m’a appris à bien recevoir les gens. Quand j’habitais Paris, mon appart était ouvert. Les potes venaient manger, dormir, créer, dès le petit déjeuner. Il y en avait qui arrivait, quand je traçais. Je les laissais, ils fermaient la porte en repartant. Mes lieux de vie ont toujours été ouverts aux autres.

Là où je suis maintenant, c’est un peu comme une résidence d’artistes. Depuis deux ans j’y accueille des artistes qui viennent se poser, respirer, créer. Le dernier était Shadee K qui est venu 10 jours. Je préparais mes collages pour Paris, donc je créais à fond et il a fait de même. On a fait des virés collages à Cahors et à Bordeaux avant de monter à Paris. Avant lui, il y avait eu des musiciens. Et après il est prévu que d’autres musiciens viennent et des artistes de la rue. Qui veut venir peut, tant qu’on me fait pas chier, qu’on partage les frais de bouffe, de déplacements s’il doit y en avoir. Je propose ça aux gens surtout ceux qui sont dans les villes, qui ont besoin de s’éloigner de tout ce speed, qui ont besoin de faire un break et qui ne connaissent personne qui peut leur permettre ça. S’ils ont envie de dormir pendant deux jours, s’ils veulent s’isoler, pleurer, chanter, discuter, créer, picoler, enfin bref, ils font ce qu’ils veulent tant que c’est cool. Pas de suicide chez moi (rires).

Je fais pleins de truc donc ça m’arrive d’être dans ma bulle aussi, de ne pas décrocher un mot de toute la journée. Si je suis dans la musique ou la vidéo, le casque sur la tête, ça me prend beaucoup de temps, je rentre dans mon univers. La présence de quelqu’un d’autre ne me dérange pas, mais si j’ai des trucs à faire faut aussi respecter ça. Si j’avais plein de tunes, assez en tout cas pour check un endroit pour en faire une vrai résidence d’artistes, ce serait top.

La solidarité c’est important, pouvoir partager avec les autres c’est important. Je suis partie vivre longtemps en Afrique, on m’a beaucoup donné là bas. Il faut le faire comme eux le font. Quand on revient en France après avoir vécu là bas, on se rend compte qu’il n’y a pas trop ça ici. Il y en a bien sur mais ça pourrait être plus. Les gens sont conditionnés par le système, l’éducation et le passé.

Envisager des fois que la relation humaine n’est pas la même. On considère des fois pas l’autre comme un être humain à des moment. On est dans rapport qui est trash.

On est à une époque vraiment bizarre. On est de la barbaque, des pantins. Pour beaucoup de choses. Dès l’école, on abime les enfants. L’éducation nationale est à revoir, comme beaucoup de choses. Il faudrait se pencher sur le système des écoles parallèles un peu, y’a du bon la dedans. Voir comment se passe l’école dans d’autres pays, le système de notation, de dire aux enfants « tu es le meilleur » et à d’autres « tu es le dernier », c’est horrible. Ça les complexe, ils n’aiment plus l’école, ça les rend introvertis, ils n’osent plus, ils perdent confiance en eux. Ça a des répercutions sur leur vie et pas en bien.

C’est fondamentalement le message de KÉLÈK de dénoncer ces situations. Il montre, il fait un rappel et il dit « ça, non, il faut que cela s’arrête ». Prenez conscience que ces choses là, elles doivent s’arrêter.

Oui, c’est ce qu’il aimerait. Tu fais une erreur. Tu t’en rends compte. Tu t’excuses et tu ne le reproduis pas. Non ? Si tu le reproduis encore c’est que tu n’as pas compris ou que tu n’arrives pas à combattre et régler ce qui t’a poussé à faire ça. Tu refais du mal à quelqu’un et tu te fais du mal. Ne plus le refaire, tu changes, tu évolues et plus les gens feront ça, plus les choses changeront et évolueront. Ça peut aller très vite si chacun s’y met vraiment. Dire non à ce que font les gouvernements, de mauvais, les conflits d’intérêts, les manipulations de toutes sortes.

Derrière un pseudo, est-ce que cela te permet de t’exprimer ? de mettre un personnage en avant et pas l’individu que tu es ? pour mieux se cacher ou mieux se montrer ?

Non. Alors j’ai plusieurs pseudos. Pour tout ce que je fais, musique, vidéo, peinture, Street art. Mais c’est pas pour me cacher, c’est parce que je fais des choses très différentes qui n’ont pas le même caractère, la même vie. C’est un peu comme un jeu aussi, ce sont différents personnages, c’est mon coté schizophrène (rires). Comme Kélèk qui est mon coté masculin et guerrier, révolté qui ne peut pas s’associer à d’autres choses que je fais qui vont plus être mon coté féminin, plus doux. Les peintures que j’ai fait pendant 15 ans n’ont rien à voir avec ce que je fais maintenant, c’était une autre période de ma vie. J’ai changé, j’ai évolué. J’ai eu plusieurs vies dans cette vie qui ne peuvent pas s’associer. C’est des entités, des traits différents de ma personnalité.

Il y a des pseudos dont je dis ouvertement que c’est moi, et d’autres qu’on ne saura pas. J’aime le mystère, les secrets, c’est un jeu. Et aussi j’ai vu le comportement des gens face au travail d’une personne, à ce qu’elle est. Il garde ça en tête, si tu fais un truc nouveau, ils vont garder en tête la première vision de toi et assimiler le nouveau à l’ancien, à ce qu’ils ont croiser une fois de toi, de ton physique, ton caractère. Mais il ne suffit pas d’une fois pour connaître quelqu’un. Si tu ne dis pas que c’est toi, ils vont avoir un autre comportement que s’ils savent que c’est toi. Je fausse un peu le jeu, je triche peut être, c’est ce que l’on pourrait dire mais je fais ce que je veux. C’est pas pour faire du mal. C’est plus pour pas que l’on m’en fasse. C’est comme de connaître la personne par son travail sans la voir en chair et en os, ni connaître son physique par les photos ou vidéos. Tu t’en fais une idée, et hop tu la rencontres. Il peut y avoir déception par rapport à l’image que tu t’en étais faite.

Mes pseudos c’est comme des histoires dans un livre, il faut qu’ils aient des titres différents. Et aussi, surtout dans le Street art, où je pourrais avoir des démêlés avec la justice, c’est pour me protéger un peu. C’est aussi pour ça que je ne veux pas que l’on me prenne en photos et si je vois que l’on m’a pris je demande à ce que les photos ne soient pas diffusées. Respect.

Est-ce qu’il y aurait une anecdote sur un collage ? une aventure curieuse d’un Kélèk ou un monstross ?

Je ne vais pas parler des mauvaises parce que je me suis déjà clashée avec plein de gens du Street art. C’est bon. J’ai juste un truc qui est venu là, quand j’ai commencé à coller au mois d’août. Je le fais pour les gamins, je les colle en bas du sol, ils sont à leur portée. Si ça doit être arraché ou nettoyé, tant pis. C’est éphémère. Une fois que c’est dans la rue, ça m’appartient plus. J’étais en train de coller, en pleine journée. Y’a un gamin qui passe avec sa maman, un petit d’origine africaine, qui s’arrête. C’était mes premiers personnes en couleur. Il regardait. Moi j’étais toute contente. Je lui dis « regarde, y’en a encore là ». du coup il regardait un peu plus haut. Et puis, le vent est arrivé. Comme je m’étale un peu avant de coller, plusieurs dessins se sont envolés. Le gamin est allé vite les chercher pour me les redonner. Je lui ai dit « tiens je te donne celui là ». puis il l’a regardé, il était content. C’était cool.

Au niveau des collaborations, est-ce que cela t’est arrivé de faire des rencontres déterminantes, qui t’ont apportée ?

Oui, il y a une personne avec qui j’ai fait des collaborations qui ont été vendues par la suite parce que la personne était connue. Elle a parlé de moi pour des expos collectives. Je suis là depuis pas longtemps. Les gens ne me connaissent pas bien encore, et je suis un peu sauvage. Je ne démarche pas trop pour exposer, donc ça m’a bien aidé. Merci encore à elle.

Sinon j’ai des collabs de prévu dans le Street art et en musique, mais je fais ça pour le plaisir. Je fais pas ça pour la gloire et les Dollars. Si ça doit aboutir à plus tant mieux, ce serait cool aussi bien sur, j’ai des factures à payer. Mais bon c’est pas mon but à la base. J’adore les collabs. Ce que cela m’apporte, rentrer dans l’univers de quelqu’un d’autre, s’accompagner, c’est beau.

S’il y avait une question à poser à un autre artiste ou tous les artistes, via ma personne, à qui et que lui demanderais tu ?

La question. Je sais pas. J’ai pas de question, enfin si sur la technique de la bombe, à ceux qui l’utilisent, comme Bault dont je kiffe le travail, la technique, l’univers, et d’autres. Epsylonpoint, m’a donné un petit cours de pochoir il y a quelques mois, c’était cool, un bon moment. J’ai surtout des demandes, de collabs.

Qui ?

En Street Art c’est avec tous ceux que je croiserais, qui sont cools et qui sont ouvert à ça. Après je kiffe le travail de plein d’artistes comme Bault, Kashink, Jace, Seth, Paella Chimicos, Stf Moscato, Stew, Dran, St Oma, Mygalo 2000, Ozmo, Blu, Cranio, Roa, Alexis Diaz, Songe, Broken Fingaz Crew, Beerens, RNST et tellement d’autres. Mais de là à faire des collabs avec eux, non, enfin ça ne viendra pas de moi. J’en accompagne certains sur les murs, c’est déjà bien.

Un autre aspect, et puis il va falloir aller au vernissage de Levalet. Niveau financier : Est-ce que tu vis de ton art ? Ou est-ce qu’il y a un à-côté ?

J’ai vécu de ça un moment, mais plus maintenant. Je vends des pièces, j’ai des commandes mais pas suffisamment pour en vivre. Comme je te disais, j’ai eu une période où je faisais pas mal d’expos et où je vendais beaucoup. Puis j’ai tout arrêté. J’aime pas me vendre, démarcher, donner des prix à ce que je fais, le rapport à la tune. Il faudrait quelqu’un qui s’occupe de ça pour moi et que je n’ai qu’à créer.

En amont de la création, c’est pas l’argent. La création, elle se fait, elle est là.

Le jour où elle se fera plus, je serai emmerdée. Quoique pas sûr. J’irais pendre un hamac sur une île au soleil ou en Amérique Latine. Une cabane dans les arbres. Un potager.  De la musique. J’ouvrirais un lieu, un bar ou resto. J’exposerais les artistes du coin. Il y aurait des concerts. La création est toujours là.

Mise à part cette sollicitation pour la fin du mois, est-ce qu’il y en a d’autres ?

J’ai peut être un truc pour septembre. Comme je te disais je viens d’arriver, je ne connais pas grand monde, pas le réseau et je ne suis pas à Paris. J’aimerais bien qu’il y ait des propositions d’expos collectives ou autres.

On parlait toute à l’heure de Facebook, de l’utilité de ces réseaux sociaux, les relations que cela peut créer, le fait que l’on puisse te contacter. Comment tu le vis ?

Ca fait deux ans que je suis sur Facebook, je trouve ça bien. Avant j’étais contre ce truc, je voyageais, je vivais de l’autre coté de la planète. J’étais plus dehors que dedans. A part les mails, je n’avais pas besoin d’internet. Il y a un truc qui m’a amené à aller sur Facebook, et j’ai découvert un univers.

Par ce biais, j’ai commencé à faire de la musique avec des gens, et ça continue. Certains sont de l’autre coté de la planète. Ça ne serait pas arriver sans ça. J’ai rencontré plein de gens, on a fait des trucs en dehors de la machine, on s’est vu pour de vrai. Je trouve ça bien, surtout pour moi qui vis reculée de tout. J’apprends plein de choses, les infos circulent, moi qui suis en demande tout le temps d’apprendre, c’est cool. Au début je suis un peu tomber dedans, le temps de bien assimiler qu’est ce que c’était ce truc, de piger l’emprise que cela pouvait avoir. J’ai pris du recul. Il faut faire attention ça peut être très dangereux. On me dit souvent que j’y suis tout le temps. Je bosse via l’ordi, pour le son, la vidéo et la photo, et je suis en contact en mp avec les gens avec qui j’ai des projets en route, qui n’ont pas forcément le même rythme de vie que moi. Si on veut que les choses avancent je dois les choper quand ils sont connectés, c’est pas toujours évident alors je reste connectée et je jette un coup d’oeil de temps en temps. Et j’y prends aussi de la nourriture artistique. Et comme je suis très isolée, il y a certaines personnes avec qui j’aime bien déconné quand je fais des pauses.

Pour les artistes c’est un super outil, pour se faire connaître et faire passer des infos, quand on fait une expo, un concert etc. Lorsque j’ai commencé à coller, des gens ont pris mes collages en photos et les ont mis sur Facebook, on a parlé de moi et on s’est intéressé à mon travail, à moi, très rapidement.

C’est un déversoir, un défouloir parfois.

Pour certains, oui. Chacun a le droit de l’utiliser comme il le veut, tant qu’il ne fait de mal à personne. Non ? Moi j’en suis contente, ça m’aide, il faut juste ne pas se faire bouffer par ça.

Dernière série de questions. Cela va être très bref.

Si tu avais un style, un groupe de musique ou une chanson à nous conseiller :

Avec KÉLÈK, le groupe Isis. Et également Gojira, Cedric Leveque, Algo.

Isis – Celestial https://www.youtube.com/watch?v=M8XN-3YZL5Y
Gojira – http://www.youtube.com/watch?v=Tqh-xSTXk9o
Cedric Leveque – https://soundcloud.com/cedric-leveque-1
Algo – https://soundcloud.com/algomusique

Si tu avais un lieu où boire un verre, où manger :

Je ne sors pas. Chez moi. Que l’on vienne manger à la maison, que l’on vienne cuisiner avec moi à fond, tout le monde d’un coup. On fait une grosse fête qui ne s’arrête jamais. Sinon, boire un coup, manger, au bord de la mer, en haut d’une montagne, dans un endroit magnifique et désert.

Si tu avais un coup de gueule, un message à passer :

Amour.

Si tu avais un voyage à faire :

L’Amérique Latine et toute la galaxie. Plus loin encore. Je suis sûre qu’il y a plein de trucs.

Si tu avais un livre à nous recommander :

Un bouquin… je ne lis plus depuis trop longtemps. Du Rudolph Steiner. Tout ce qu’il a écrit.

S’il y avait une question que je ne t’ai pas posée et qui restera sans réponse, ça serait. Est-ce qu’il y en a une ? Moi j’en ai une mais : quelles sont toutes tes autres entités ?

Tu peux la poser, tu peux la mettre dans l’interview si tu veux. Ben il n’y aura pas de réponse. Mystère.

Si tu avais une question à me poser, où tu étais assuré que je réponde et que je te dise la vérité, tu me demanderais quoi ?

Est-ce que tu peux garder mon caddie pendant que je vais faire pipi ? et après on y va.

Oui